Antonio Altarriba – L’Art de Voler
Un homme qui a tout vécu, sauf la vie dont il rêvait !
4 mai 2001, âgé de 90 ans, Antonio Alatarriba s’élance du quatrième étage de sa maison de retraite, mettant ainsi fin à une vie faite d’espoirs et de désillusions. C’est sur bases des notes décousues d’Antonio Alatarriba senior que son fils va relater le parcours d’un homme qui rêvait de liberté, mais qui dû finalement se contenter de ce que lui offrit l’Histoire.
L’existence d’Antonio Alatarriba étant intimement liée aux événements qui ont secoués l’Espagne et l’Europe du 20e siècle, l’auteur relate non seulement le quotidien de son paternel, mais également l’histoire d’un pays et d’une époque riche en bouleversements. Composé de quatre chapitres distincts, ce one-shot revient tout d’abord sur l’enfance d’Antonio dans un petit village rural d’Aragon. Élevé à la dure, le petit dernier d’une famille de paysans rêve déjà de liberté et d’aventures, loin de son bled natal. Alors qu’il tente de donner une direction à sa vie, son envol va être précipité par le souffle de l’Histoire, qui balayera une à une ses illusions. La fin de la dictature de Primo de Rivera, la chute de la monarchie, la Seconde république, la guerre civile, le régime de Franco, l’exode, la Seconde Guerre mondiale, la Résistance française, les camps de réfugiés français de Cyprien-plage… tant d’événements qui vont ballotter la destinée du protagoniste principal, jusqu’au retour au pays, dans une Espagne où il ne trouve plus sa place. Tant de défaites qui auront finalement raison de ses idéaux. Non, il ne volera pas !
Afin de se rapprocher du lecteur, Antonio Alatarriba décide de fusionner avec son père (l’autre Antonio Alatarriba), le temps d’un récit. En racontant cette histoire à la première personne, endossant ainsi l’identité de son père, l’auteur revit l’histoire de l’Espagne en compagnie de son paternel. Se raccrochant tout d’abord à une alliance de plomb conclue avec ses camarades anarchistes et ensuite à une alliance de sang, établie avec son fils, l’homme survit d’abord aux péripéties servies par l’Histoire et ensuite à une existence qui n’est pas celle dont il rêvait. Même si le récit n’est pas dépourvu d’amour et d’humour, il est néanmoins parsemé de désillusions. Les revers sont trop nombreux et l’homme, obligé de tourner le dos à trop d’idéaux, termine sa vie par quinze années de dépression dans une maison de retraite. Un vieillard qui aura tant vécu, sans jamais réussir à vivre sa vie, mais qui n’aura jamais renoncé à prendre son envol vers la liberté, même si le vol ne dura finalement que quatre étages !
Le graphisme du barcelonais Kim (Joaquim Aubert Puigarnau) restitue parfaitement l’ambiance de l’époque et contribue donc à faire revivre l’évolution de l’Espagne lors du XXème siècle. En insérant plusieurs métaphores visuelles, comme cette taupe qui creuse la poitrine d’Antonio, le dessinateur abandonne aussi sporadiquement son rendu réaliste des déboires d’Antonio. Cette approche permet de faire ressortir quelques moments clés du récit.
À l’instar d’Art Spiegelman sur l’incontournable « Maus », l’auteur de « L’art de voler » revient sur un page importante de l’Histoire de l’Europe en reconstituant avec soin le quotidien de son père.
Retrouvez cette BD dans MON TOP 2011 et dans MES ALBUMS DU MOIS !
Lisez également l’avis de Marion !
Lisez l’avis de Mr. Zombi sur K.BD !
24 mai 2011 à 7 h 36 min
Ca peut être un moyen de redécouvrir l’histoire de l’Espagne
24 mai 2011 à 17 h 30 min
Yep, j’ai découvert une grande partie de l’histoire de l’Espagne en lisant cette album et le fait de découvrir ces événements historiques à travers le regard et le prisme des idéaux d’Antonio Alatarriba est assez intéressant !
30 mai 2011 à 9 h 49 min
Oui, moi aussi j’ai découvert un pan d’histoire, qui est pourtant ma période préférée.
Un excellent ouvrage, ceci dit, j’ai trouvé que le mélange du père et du fils était un peu superflu. Sans doute nécessaire à cette sorte de psychanalyse que réalise Antonio fils par l’écriture, mais finalement, pas vraiment utile. Qu’en penses-tu toi?
30 mai 2011 à 18 h 55 min
Je trouve que la formule du « je » rapproche le personnage du lecteur et comme ils ont le même nom, finalement, pourquoi ne pas les fusionner le temps d’un album. Cela permet au fils de se rapprocher du père (la sorte de psychanalyse dont tu parles)et au lecteur de se rapprocher des deux (l’empathie s’en retrouve renforcée).
30 mai 2011 à 19 h 09 min
Je trouve que dans ce cas, le fils est beaucoup trop absent. Je ne suis pas à l’aise sur cet aspect de l’album. Moi, je m’en fiche, du fils, après avoir lu cet album. Je suis content pour lui qu’il ait pu progresser grâce à cet ouvrage, excellent par ailleurs, mais c’est son père qui m’intéresse, pas lui.
30 mai 2011 à 20 h 05 min
Ah mais, on s’en fiche tous du fils je crois 🙂
24 octobre 2011 à 6 h 03 min
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18 juin 2013 à 20 h 31 min
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9 décembre 2013 à 21 h 41 min
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