Mohamed Mbougar Sarr – La plus secrète mémoire des hommes
Un chef-d’œuvre ?
Ce quatrième ouvrage de Mohamed Mbougar Sarr, couronné du Prix Goncourt 2021, invite à suivre les pas de Diégane Latyr Faye, jeune écrivain qui tombe sous le charme d’un livre mythique intitulé « Le labyrinthe de l’inhumain ». Tout d’abord salué par la critique, ce roman paru en 1938 sera retiré des ventes après des accusations de plagiat et son mystérieux auteur d’origine sénégalaise, T.C. Elimane, qualifié de « Rimbaud nègre », disparaîtra dans la nature…
« Mais peut-on croire aux disparitions sans héritage ? Aux évanouissements absolus ? Je n’y croyais pas. Je n’y crois toujours pas. Il y a une présence qui demeure après tout départ. Peut-être même la vraie présence des êtres et des choses commence-t-elle seulement après leur disparition. »
Si le point de départ de ce roman s’inspire de l’histoire vraie du Malien Yambo Ouologuem, premier romancier africain à recevoir le Prix Renaudot en 1968 pour « Le Devoir de violence » et ayant vécu reclus jusqu’à la mort suite à des accusations de plagiat, cette quête littéraire qui invite à partir à la recherche de l’auteur d’un roman culte introuvable, propose surtout une réflexion profonde sur la littérature.
J’ai été totalement subjugué par la première partie de cette enquête et par la prose magnifique de Mohamed Mbougar Sarr. Mais, malgré le souffle romanesque incroyable du roman, sa construction labyrinthique a fini par m’essouffler. De Dakar à Paris, en passant par Buenos Aires et Amsterdam, l’auteur multiplie les points de vue, sautant d’un narrateur à l’autre, multipliant les styles d’écriture, les références littéraires et les temporalités, abordant de nombreux thèmes, allant de la colonisation au nazisme, traversant un siècle d’histoire, certes en ensorcelant le lecteur grâce à la magie de ses mots, mais en l’exténuant au fil de phrases parfois interminables, l’abandonnant sur le cul, car oui c’est un beau Goncourt…mais ce n’est pas le plus accessible !
Servi par une plume prodigieuse, « La plus secrète mémoire des hommes » vous invite donc à partir sur les traces d’un chef-d’œuvre…mais pas forcément celui-ci.
« Un temps la Critique accompagne l’Œuvre, ensuite la Critique s’évanouit et ce sont les Lecteurs qui l’accompagnent. Le voyage peut être long ou court. Ensuite les Lecteurs meurent un par un et l’Œuvre poursuit sa route seule, même si une autre Critique et d’autres Lecteurs peu à peu s’adaptent à l’allure de son cinglage. Ensuite la Critique meurt encore une fois et les Lecteurs meurent encore une fois et sur cette piste d’ossements l’Œuvre poursuit son voyage vers la solitude. S’approcher d’elle, naviguer dans son sillage est signe indiscutable de mort certaine, mais une autre Critique et d’autres Lecteurs s’en approchent, infatigables et implacables et le temps et la vitesse les dévorent. Finalement l’Œuvre voyage irrémédiablement seule dans l’Immensité. Et un jour l’Oeuvre meurt, comme meurent toutes les choses, comme le Soleil s’éteindra, et la Terre, et le Système solaire et la Galaxie, et la plus secrète mémoire des hommes. »
La Plus Secrète Mémoire des hommes, Mohamed Mbougar Sarr, éditions Philippe Rey, 448 p., 22€
Ils en parlent également : Pamolico, Nicole, Natiora, Miriam, Joëlle, Marie-Eve, Karine, Calliope, Un balcon en forêt, Cercle littéraire de Dordogne
20 novembre 2021 à 11 h 28 min
Merci pour cette chronique qui rejoint ma non envie de le découvrir après avoir écouté plusieurs interviews …. Je pense qu’il n’est pas pour moi 🙂
20 novembre 2021 à 12 h 16 min
J’avais également le sentiment qu’il n’était pas vraiment pour moi, mais c’est ce prix m’a fait changer d’avis…
20 novembre 2021 à 14 h 04 min
Ah ah ah moi je me méfie des prix, de certains… Ce n’est pas pour moi un critère primordial…. 😉
23 novembre 2021 à 16 h 57 min
Pour moi non plus…mais j’ai été faible 🙂
20 novembre 2021 à 15 h 59 min
Il m’attend et j’ ai peur d’ avoir le même ressenti
23 novembre 2021 à 16 h 59 min
J’espère que tu parviendras à apprécier sa plume sans te perdre dans le récit 😉
21 novembre 2021 à 9 h 56 min
Merci beaucoup pour le lien ! Certes, il est difficile d’accès, mais j’ai adoré me perdre dans ses méandres… 🙂
23 novembre 2021 à 17 h 00 min
J’ai surtout adoré découvrir sa plume car je n’aime pas trop me perdre 🙂
21 novembre 2021 à 10 h 27 min
[…] Ils/elles en parlent aussi : Capitaine Alexandre. Les Carpenters racontent. Les liseuses. Miriam. Un balcon en forêt. Le jardin de Natiora. Sur la route de Jostein. Joelle books. J’ai 2 mots à vous dire. Sin city […]
21 novembre 2021 à 13 h 08 min
je vais tenter l’aventure, ne serait ce que pour découvrir son écriture
23 novembre 2021 à 17 h 01 min
J’ai tellement aimé sa plume que je vais tout de même tenter son précédent roman « De purs hommes »…qui semble plus accessible 😉
21 novembre 2021 à 13 h 19 min
Je vais me lancer aussi, en prenant mon temps pour ne pas me perdre !
23 novembre 2021 à 17 h 03 min
Ah…prendre son temps…voilà qui est un bon plan dans ce monde où tout va trop vite 🙂
22 novembre 2021 à 11 h 32 min
C’est pour cette raison que je ne le lirais sûrement pas ! Merci pour cette chronique très utile !
23 novembre 2021 à 17 h 04 min
De rien… mais je vais tenter son précédent roman « De purs hommes » qui semble plus accessible, car sa plume vaut tout de même le détour 😉
22 novembre 2021 à 12 h 08 min
Je reste curieuse malgré ton ressenti mais aucune urgence, on verra dans quelques mois quand l’engouement sera retombé.
23 novembre 2021 à 17 h 05 min
Ah, cette curiosité qui fait exploser les PÀL… je connais 🙂
30 novembre 2021 à 15 h 40 min
[…] – Sin City – Carnet de voyage et notes de lecture de Miriam – Natiora – JoelleBooks – […]
17 décembre 2021 à 11 h 44 min
Comme l’écriture est superbe, je vais peut-être tenter le coup. Merci d’en parler en tout cas
17 décembre 2021 à 13 h 16 min
Bonne lecture alors…visiblement, de nombreux lecteurs conseillent son précédent, plus accessible, mais également très bien écrit. Il est dans ma PÀL 😉