Archive for the Cambourakis Category

Zerocalcare – Kobane calling

Posted in BANDES DESSINÉES, Cambourakis, Franco-Belge, Guerre, One-shots, [Avancé], [DL 2016] with tags , on 28 octobre 2016 by Yvan

Les coulisses du conflit syrien !

Zerocalcare - Kobane callingCe roman graphique qui a connu un énorme succès en Italie, avec plus de 400 000 exemplaires vendus, est dorénavant également édité en version française grâce aux éditions Cambourakis. Le dessinateur et blogueur italien Zerocalcare (Michele Rech de son vrai nom) y relate ses voyages aux confins de la Syrie, de l’Irak et de la Turquie, jusque dans ville de Kobané, symbole de la résistance des Kurdes face à Daech.

« Tu entends Ratatata, c’est Daech. Tu entends Toum toum toum, c’est nous.
– Et Sboum ?
– Sboum, ça dépend. Feu et Sboum, c’est les Américains, Sboum tout seul, c’est Daech. »

À partir de ses voyages dans l’une des régions les plus dangereuses de la planète, il livre un témoignage visant à clarifier les enjeux majeurs d’un conflit souvent trop simplifié par nos médias. À l’instar d’un Joe Sacco, il se place à hauteur d’homme, observe le quotidien des gens qui (sur)vivent au centre du conflit et partage les témoignages qu’il recueille sur place. Sur base de rencontres avec des femmes combattantes (dont la commandante Nasrine, leader des unités de protection de Rojava), avec des partisans du PKK (dont Hevàl Cuma, confondateur du PKK) et avec des victimes de la guerre, il propose un carnet de voyage sur un sujet d’actualité fort et partage la réalité de cette terrible guerre civile. De la résistance des Kurdes de Syrie à l’avancée de Daech, en passant par le rôle parfois discutable de la Turquie, il s’efforce de retranscrire toute la complexité et les enjeux majeurs du conflit.

Zerocalcare ne se cantonne cependant pas dans un rôle de reporter de guerre, mais partage également ses émotions et ses états d’âme, souvent à l’aide d’un personnage imaginaire qui incarne ses peurs et ses angoisses. En multipliant les références à Ken le Survivant, à Resident Evil ou même aux équipes de foot de la Série A, il insuffle également beaucoup d’humour et d’autodérision à l’ensemble. Il a cependant parfois tendance à en faire de trop, diluant ainsi la force de son message. Diminuer le nombre de parenthèses inutiles aurait certainement contribué à prendre son témoignage plus au sérieux. Visuellement, le style caricatural du dessin accentue d’ailleurs encore un peu plus le côté humoristique et désinvolte de l’ouvrage, faisant ainsi un peu trop d’ombre à un fond foncièrement sérieux et à la gravité du propos.

Lecture indispensable !

Joseph Lambert, Annie Sullivan et Helen Keller

Posted in BANDES DESSINÉES, Ca et Là, Cambourakis, Comics, One-shots, [Angoulême 2014], [DL 2013], [Sans super-héros] with tags , , on 25 décembre 2013 by Yvan

La meilleure BD de 2013 !

Joseph Lambert, Annie Sullivan et Helen KellerJoseph Lambert s’attaque ici à un véritable monument. Adaptée au cinéma en 1962 (« Miracle en Alabama »), racontée en livres et même célébrée chaque 27 mai lors du « Helen Keller’s Day », tout le monde connaît l’histoire d’Annie Sullivan et d’Helen Keller outre-Atlantique.

« Annie Sullivan et Helen Keller » est l’histoire de deux femmes marquées par la vie. La première, une malvoyante au caractère bien trempé passe son enfance dans l’hospice malfamé de Tewksbury avant d’être envoyée à l’Institut Perkins, spécialisé pour les aveugles. La deuxième, une gamine sourde et aveugle, doit son salut à Annie Sullivan qui, en devenant sa préceptrice, la sortira petit-à-petit de l’ombre.

Tout au long de cet album de près de 90 pages, l’auteur raconte l’incroyable transformation de cette petite de six ans perdue dans le noir. Page après page, il pénètre son univers et accompagne avec brio l’éveil de cette enfant handicapée qui parvient progressivement à mettre des mots sur le monde qui l’entoure. En relatant l’histoire de ces deux femmes qui parviennent à communiquer en se touchant les mains au rythme du langage des signes, Joseph Lambert narre non seulement une merveilleuse histoire d’amitié, mais il permet surtout d’assister à l’éveil d’un esprit et à la naissance d’un véritable symbole à une époque où l’intégration des personnes handicapées est encore complètement taboue.

Les progrès d’Helen sont entrecoupés de flash-backs qui permettent de revenir sur l’enfance traumatisante d’Annie et de mieux comprendre son comportement et son raisonnement en tant qu’instructrice.

Dans cette Amérique conservatrice, l’apprentissage de ces deux femmes normalement condamnées à vivre à l’écart, est racontée en toute simplicité, sans verser dans le larmoyant. Visuellement, le dessin peu attrayant de Joseph Lambert, découpé dans un format gaufrier de seize cases par planche, ne donne pas forcément envie de se plonger dans l’album. Son choix graphique pour représenter l’univers d’Helen est cependant magistral. Plongé dans l’obscurité dès la première page, le lecteur accompagne la petite dans ce périple qui la mène mot après mot vers la lumière. Au fil de ses progrès, les cases deviennent moins sombre et son monde commence à prendre forme. L’auteur parvient ainsi à faire passer toutes les émotions ressenties par cette petite fille aveugle, sourde et muette qui était perdue dans un océan d’obscurité avant qu’on lui tende la main.

Mon coup de cœur de 2013 !

Retrouvez d’ailleurs ce one-shot dans mon Top de l’année, dans mon Top du mois, dans mon Top du Festival d’Angoulême, ainsi que parmi les dix albums sélectionnés dans la catégorie « Meilleur album » des BDGest’Art.

S.M. Vidaurri – Iron ou la guerre d’après

Posted in BANDES DESSINÉES, Cambourakis, Comics, Guerre, One-shots, [DL 2013], [Sans super-héros] with tags , on 20 juin 2013 by Yvan

Que faire à la fin d’un conflit armé ?

S.M. Vidaurri - Iron ou la guerre d'aprèsCette première œuvre de S.M. Vidaurri aborde la guerre d’après, ce moment où le conflit est officiellement terminé, mais où les plaies ne sont pas encore cicatrisées et où les acteurs n’ont pas encore pu ou voulu effacer les événements passés.

En situant son récit dans un endroit perpétuellement enneigée et recouvert d’un épais brouillard, l’auteur efface tout repère géographique ou temporel. Cette universalité du sujet se prolonge au niveau des personnages, qui n’ont pas de visage humain, mais qui sont représentés sous forme d’animaux.

Dans ce pays qui se relève péniblement d’une guerre civile, une poignée de vaincus refuse d’abandonner le combat et dérobe des documents secrets aux forces gouvernementales afin de préparer un attentat contre le pouvoir en place. Au fil des pages, le lecteur découvre progressivement tous les acteurs de ce complot, manichéisme du lâche à l’innocent, en passant par l’indécis. Sans véritablement s’attacher aux différents personnages, le lecteur saura apprécier la complexité de leurs relations, ainsi que leur questionnement.

L’auteur demeure volontairement flou sur les origines de cette guerre civile et préfère se concentrer sur ses conséquences et sur ce moment particulièrement trouble juste après le conflit, où règne une atmosphère riche en incertitudes. Faut-il poursuivre le combat ou s’accrocher à des valeurs devenues subitement plus floues ? S.M. Vidaurri propose donc un récit d’espionnage qui parle d’idéaux, d’honneur et d’engagement, mais également une histoire de famille, de transmission et de filiation.

« J’ai fait des choses dont je ne suis pas fier, et d’autres qui je l’espère, un jour, nous rendrons fiers. Je combats depuis trop longtemps pour pouvoir faire la différence. »

Visuellement, cette première réalisation est une véritable réussite. Le travail au niveau de la colorisation et de l’ambiance est remarquable et insuffle un mélange de poésie, d’incertitude et de tension à chaque planche.

Une excellente surprise !

Jisue Shin – 3 grammes

Posted in BANDES DESSINÉES, Cambourakis, Maladie, Manga / Manhwa, One-shots, [DL 2012] with tags , on 24 mai 2012 by Yvan

Témoignage d’un combat contre LA maladie !

Jisue Shin - 3 grammesLe nombre de personnes qui désirent témoigner de leur combat contre le cancer est de plus en plus élevé et cela se ressent jusque dans le neuvième art. Si les défaites face à la maladie sont nombreuses (« Journal d’un adieu », La Mort dans l’âmeDavid, les femmes et la mort), il y a heureusement également quelques victoires à partager.

À l’instar de La Parenthèse, « 3 grammes » est donc le récit autobiographique d’une victoire contre la maladie. L’auteure, Jisue Shin y relate son combat contre une tumeur de l’ovaire. Âgée de 26 ans lorsque les examens radiologiques rendent leur verdict, la jeune femme voit son avenir complètement bouleversé. Le parcours qui l’attend est malheureusement connu de tous : diagnostic, hospitalisation, opération, chimiothérapie, perte de cheveux, nausées, solitude, doutes et questionnements. Si la route vers la guérison est longue et pleine d’angoisse, chaque étape est racontée avec grande justesse, sans jamais virer dans le pathos. La jeune graphiste coréenne raconte sa lutte avec sincérité et partage ses émotions, ses interrogations et ses peurs avec beaucoup de pudeur, sans sombrer dans l’excès.

Je ne suis pas trop fan du dessin à la base, mais ce trait minimaliste et discret parvient tout de même à aller à l’essentiel de manière très efficace. Cette simplicité non dénué d’humour accompagne brillamment le récit, en multipliant des non-dits qui font souvent mouche là où il devient difficile de s’exprimer avec des mots.

Un témoignage sincère et émouvant !

Joanna Hellgren – Frances, Episode 3

Posted in BANDES DESSINÉES, BD du mercredi, Cambourakis, Trilogies, [Avancé], [DL 2012] with tags , on 12 mars 2012 by Yvan

Conclusion d’un triptyque suédois incontournable !

Joanna Hellgren - Frances, Episode 3Le premier volet de cette trilogie édité aux éditions Cambourakis invitait à suivre les pas d’une petite fille déracinée, recueillie par sa tante à la mort de son père, proposant au lecteur de découvrir progressivement les dessous de cette famille au fil des pages. Si le deuxième tome surprenait quelque peu en délaissant le quotidien de la petite Frances pour explorer le passé d’autres protagonistes, le lecteur est maintenant habitué à cette narration faite d’allers-retours dans le temps. C’est une excellente chose, car ce troisième volet se poursuit selon le même procédé, reconstruisant progressivement le puzzle familial qui a conduit Frances là où elle est, en passant constamment d’un personnage à l’autre.

Si à la fin du premier épisode chacun semblait avoir enfin trouvé sa place et son équilibre au sein de ce nouvel environnement familial, les deux épisodes suivants remontent lentement le fil du temps et se concentrent sur d’autres personnages, permettant ainsi au lecteur de comprendre comment la petite Frances s’est retrouvée orpheline chez sa tante. Si le tome précédent avait déjà fait le point sur la mère de Frances, invitant à suivre sa jeunesse, de sa rencontre avec August jusqu’au moment où son chemin quitta celui de sa fille, ce dernier volet permet surtout de mieux comprendre le père de Frances, ainsi que sa sœur Ada. En explorant le passé des personnages et en développant leur psychologie au fil des tomes, Joanna Hellgren livre toutes les clés nécessaires à la compréhension et à la reconstitution de cette chronique familiale, tout en octroyant au lecteur sa part d’interprétation. Brillant !

Au niveau du graphisme, le lecteur appréciera surtout le plaisir de retrouver l’ambiance, la sensibilité et l’esthétisme du tome précédent. Ce dessin, tout en crayonné, permet à nouveau de véhiculer les sentiments des personnages avec beaucoup de retenue et d’efficacité. En voguant sur un rythme lent et en s’exprimant en toute simplicité sur des sujets sensibles à l’aide d’une narration qui repose grandement sur des regards, des gestes, des incompréhensions et des non-dits, la jeune auteure suédoise livre un récit d’une grande sensibilité, restituant avec brio la fragilité et les émotions de ses personnages. Si l’empathie envers les personnages est grande, l’auteure parvient également à plonger ce triptyque dans une ambiance particulière, voire envoûtante, située en dehors du temps, quelque part en Suède, probablement lors de la première moitié du XXème siècle. Magnifique !

Incontournable !

Retrouvez d’ailleurs cet album dans mon Top de l’année et dans mon Top du mois.

Joanna Hellgren – Frances, Episode 2

Posted in BANDES DESSINÉES, BD du mercredi, Cambourakis, Trilogies, [Avancé], [DL 2010] with tags on 7 mars 2012 by Yvan

Suite d’une chronique familiale fortement conseillée !

Joanna Hellgren - Frances, Episode 2Le premier volet de cette trilogie éditée aux éditions Cambourakis invitait à suivre les pas d’une petite fille déracinée, recueillie par sa tante à la mort de son père. Au fil des pages, le lecteur découvrait progressivement les dessous de cette famille et, en fin de premier épisode, chacun semblait avoir enfin trouvé sa place et son équilibre au sein de ce nouvel environnement.

Si ce deuxième volet continue de s’intéresser au quotidien de la petite Frances, de sa tante Ada et de sa compagne aux lévriers blancs, il explore surtout le passé de certains protagonistes. Comme l’action de cette trilogie se situe dans une grande ville de Suède, probablement lors de la première moitié du XXème siècle, le lecteur manque un peu de repères et sera d’ailleurs légèrement perdu lors des premiers flash-backs. Il ne lui faudra heureusement que quelques pages pour comprendre que cette histoire parallèle développée par Joanna Hellgren invite à suivre la jeunesse de la mère de Frances, de sa rencontre avec August jusqu’au moment où son chemin quitta celui de sa fille.

Si ce rebondissement au niveau du scénario permet d’ouvrir l’intrigue à un retour éventuel d’Esther dans le quotidien de Frances, le lecteur appréciera surtout le plaisir de retrouver l’ambiance, la sensibilité et l’esthétisme du tome précédent. Ce dessin, tout en crayonné, permet à nouveau de véhiculer les sentiments des personnages avec beaucoup de retenue et d’efficacité. En voguant sur un rythme lent et en s’exprimant en toute simplicité sur des sujets sensibles à l’aide d’une narration qui repose grandement sur des regards, des gestes, des incompréhensions et des non-dits, la jeune auteure suédoise livre un récit d’une grande sensibilité, restituant avec brio la fragilité et les émotions de ses personnages.

bd du mercrediAllez découvrir les autres BDs du mercredi sur le blog de Mango !

Joanna Hellgren – Frances, Episode 1

Posted in BANDES DESSINÉES, Cambourakis, K.BD, Trilogies, [Avancé], [DL 2008] with tags on 1 mars 2012 by Yvan

Chronique familiale d’une extrême justesse !

Joanna Hellgren - Frances, Episode 1Après « Mon frère nocturne », one-shot également édité aux éditions Cambourakis et nominé au Festival d’Angoulême 2009, « Frances » est le deuxième album de Joanna Hellgren.

Ce premier volet d’une trilogie dont l’action se situe dans une grande ville de Suède, probablement lors de la première moitié du XXème siècle, invite à suivre les pas d’une petite fille recueillie par sa tante à la mort de son père. En suivant cette fillette déracinée, le lecteur découvre progressivement les dessous de cette famille.

C’est donc un drame familial qui va réunir l’intrigante petite Frances et sa tante. Si le changement est surtout rude pour la petite, au fil des pages, elles vont chacune trouver leur place au sein de ce nouvel environnement. En abordant avec finesse l’enfance et la difficulté de prendre sa vie en main en assumant ses choix, l’auteur livre une chronique familiale d’une grande justesse.

Le graphisme peut initialement rebuter et sembler approximatif, mais ce style naïf et dépouillé contribue à baigner le récit dans une sorte de fragilité enfantine, qui permet de faire passer énormément d’émotions. Ce dessin, tout en crayonné, permet en effet de véhiculer les sentiments des personnages avec beaucoup de retenue et d’efficacité. En voguant sur un rythme lent et en s’exprimant en toute simplicité sur des sujets sensibles à l’aide d’une narration qui repose grandement sur des regards, des gestes, des incompréhensions et des non-dits, la jeune auteure suédoise livre un récit d’une grande sensibilité.

Une lecture très fortement conseillée !

Joanna Hellgren - Frances, Episode 1Découvrez également l’avis à plusieurs mains de K.BD