Archive for the Manu Larcenet Category

Manu Larcenet – Le Rapport de Brodeck, L’indicible (Tome 2)

Posted in BANDES DESSINÉES, Dargaud, Diptyques, Franco-Belge, Manu Larcenet, [Accessible], [DL 2016] with tags , on 20 juillet 2016 by Yvan

La peur de la différence…

Manu Larcenet - Le Rapport de Brodeck, L'indicible (Tome 2)Ce deuxième volume propose la suite et fin de la magistrale adaptation du roman éponyme de Philippe Claudel par un Manu Larcenet qui poursuit avec brio son exploration des tréfonds de l’âme humaine.

Cette deuxième partie de diptyque poursuit l’enquête de Brodeck dans ce petit village recouvert par la neige, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Sous la menace des autres villageois, le malheureux fonctionnaire est en effet contraint de rédiger un rapport expliquant l’exécution collective d’un étranger venu s’installer dans ce bled perdu. C’est dans un climat de peur et de suspicion qu’il mène donc un semblant d’enquête sur l’exécution de celui qu’ils surnommaient « der Anderer », question de bien souligner sa différence dès le départ. En cherchant à comprendre le pourquoi de ce crime collectif, Brodeck va également raviver de douloureux souvenirs personnels, de son village d’enfance en proie aux flammes à sa récente déportation dans un camp de l’horreur.

Du jour où les soldats ennemis ont pris possession de ce petit village isolé qui ne sera plus jamais le même par la suite, à la venue de cet Anderer beaucoup trop différent, en passant par son retour des camps et le mutisme de sa femme, le récit de Brodeck se construit dans la peur. Ce huis clos au sein d’une petite communauté refermée sur elle-même n’a donc rien de réjouissant. La peur de l’autre contribue à installer une ambiance xénophobe nauséabonde, où lâcheté, collaboration, peur, pression et déshumanisation deviennent progressivement rois. Le portrait dressé par l’auteur est aussi sombre qu’écœurant… et se veut malheureusement toujours d’actualité… l’autre et la différence n’étant souvent pas les bienvenus…

La plus grosse claque de cet ouvrage édité dans un format à l’italienne vient une nouvelle fois du graphisme noir et blanc de Manu Larcenet. Proposant un dessin encore plus réaliste que dans « Blast« , qui s’installe immédiatement au diapason d’une atmosphère sombre et pesante, l’auteur livre un graphisme d’une force évocatrice époustouflante. Les nombreuses scènes muettes démontrent non seulement sa maîtrise incroyable des non-dits et des silences, mais parviennent surtout à saisir l’indicible. Que ce soit au niveau des visages marqués par la souffrance et la haine ou au niveau de cette nature hostile, la noirceur du style graphique de l’auteur fait une nouvelle fois mouche. Si les planches de Larcenet allient force et poésie, c’est surtout la manière dont il croque « der Anderer » qui m’a touché. Alors que les autres personnages semblent dissimuler de lourds secrets, l’étranger dégage quelque chose d’attachant, donnant l’impression qu’il est le seul à pouvoir compter sur la sympathie de Larcenet… un artiste également différent des autres, mais tellement grand.

Respect !

Un gros coup de cœur, que vous retrouverez évidemment au sommet de mon Top BD de l’année !

Ils en parlent également : Mo’, Noukette, Jérôme

Manu Larcenet – Le Rapport de Brodeck, L’autre

Posted in BANDES DESSINÉES, Dargaud, Diptyques, Franco-Belge, Manu Larcenet, [Accessible], [DL 2015] with tags , on 22 avril 2015 by Yvan

La peur de l’étranger…

Manu Larcenet - Le Rapport de Brodeck, L’autreAprès l’excellente série Blast, Manu Larcenet poursuit son exploration des tréfonds de l’âme humaine en adaptant le roman éponyme de Philippe Claudel, paru en 2007.

Cette première partie de diptyque plonge le lecteur dans un petit village recouvert par la neige, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Sous la menace des autres villageois, Brodeck est contraint de rédiger un rapport expliquant l’exécution collective d’un étranger venu s’installer dans ce bled perdu. C’est dans un climat de peur et de suspicion que le petit fonctionnaire mène un semblant d’enquête sur l’exécution de celui qu’ils surnommaient « der Anderer », question de bien souligner sa différence dès le départ. En cherchant à comprendre le pourquoi de ce crime collectif, Brodeck va également raviver de douloureux souvenirs personnels, de son village d’enfance en proie aux flammes à sa récente déportation dans un camp de l’horreur.

« Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache. Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer. Mais les autres m’ont forcé […] ».

Ce huis clos au sein d’une petite communauté refermée sur elle-même n’a donc rien de réjouissant. La peur de l’autre contribue à installer une ambiance xénophobe nauséabonde, où lâcheté, collaboration, peur, pression et déshumanisation deviennent progressivement rois. Le portrait dressé par l’auteur est aussi sombre qu’écœurant… et se veut malheureusement toujours d’actualité… l’autre et la différence n’étant souvent pas les bienvenus…

La plus grosse claque de cet ouvrage édité dans un format à l’italienne vient une nouvelle fois du graphisme noir et blanc de Manu Larcenet. Dès la scène d’ouverture entièrement muette, ce dessin, encore plus réaliste que dans Blast, s’installe au diapason d’une atmosphère sombre et pesante. Que ce soit au niveau des visages marqués par la souffrance et la haine ou au niveau de cette nature hostile, la noirceur du style graphique de l’auteur fait une nouvelle fois mouche. Si les planches de Larcenet allient force et poésie, c’est surtout la manière dont il croque « der Anderer » qui m’a touché. Alors que les autres personnages semblent dissimuler de lourds secrets, l’étranger dégage quelque chose d’attachant, donnant l’impression qu’il est le seul à pouvoir compter sur la sympathie de Larcenet…

Un gros coup de cœur, que vous retrouverez évidemment au sommet de mon Top BD de l’année !

Manu Larcenet – BLAST, Pourvu que les bouddhistes se trompent (Tome 4)

Posted in BANDES DESSINÉES, BD du mercredi, Dargaud, Festival BD Angoulême, Franco-Belge, Manu Larcenet, Séries, [Angoulême 2015], [Avancé], [DL 2014], [Terminées] with tags , , on 12 mars 2014 by Yvan

Enfin libre !

Manu Larcenet – BLAST, Pourvu que les bouddhistes se trompentLe voilà, le dernier BLAST ! La dernière confrontation entre la grasse carcasse de Polza Mancini et les deux inspecteurs qui poursuivent inlassablement l’interrogatoire de cet homme dont la culpabilité n’a jamais vraiment fait de doute, mais dont la motivation des actes barbares demeure cependant inconnue.

A coups de flash-backs, le lecteur poursuit le compte-rendu de cet homme qui a abandonné son foyer pour se mettre en marge de la société, à la recherche du BLAST, cet état second qui lui permet de s’évader d’une réalité qui ne lui a jamais vraiment souri. Une descente aux enfers certes rythmée par la prise d’alcool, de médicaments et de drogues, mais également accompagnée d’une bouffée de liberté et d’une communion avec la nature et marquée par quelques rencontres surprenantes. Après sa rencontre avec Jacky Jourdain, un dealer SDF, et celle de Vladimir et Illitch lors du tome précédent, Polza Mancini termine son errance auto-destructrice en compagnie de Roland Oudinot et sa fille Carole… celle qu’on le soupçonne d’avoir tuée. En attendant l’été pour reprendre la route, Polza lève le voile sur les pathologies de chacun, livrant au passage les dernières pièces qui permettront à tout le monde de reconstruire le puzzle des événements. Allant au bout de la noirceur de son récit, Larcenet ponctue la fuite de son héros d’un huis-clos en compagnie son ami schizophrène et de celle qu’il aime et d’un ultime BLAST… celui qui précède son arrestation.

Manu Larcenet prend à nouveau tout son temps pour narrer l’histoire de son personnage, alternant des passages muets pourvus d’une grande force évocatrice et des passages plus verbeux où chaque mot semble néanmoins pesé. Une justesse narrative qui permet de toucher à la personnalité de cet homme et d’aller bien au-delà de sa grasse carcasse, créant énormément d’empathie envers cet homme au casier judiciaire presque aussi imposant que sa masse corporelle. Physiquement, l’homme obèse et répugnant n’a rien pour plaire, mais dans le fond, cet écrivain de profession a quelque chose de poétique et de touchant. C’est avec grand intérêt que le lecteur accompagne l’errance de cet individu en rupture avec la société et qui, depuis sa « tendre » enfance est mis à l’écart. Le but de ce long voyage introspectif est la recherche du prochain BLAST, cet instant magique où il s’évade de son corps pour entrer en communion avec le monde, ce sentiment de plénitude qui, un bref instant, le libère de tous ses maux. Usant d’une narration proche de la perfection, l’homme se livre, partage ses angoisses, ses divagations, son mal-être, sa folie, ses malaises vis-à-vis de la société et ses réflexions sur le sens de la vie. Un parcours (sur)prenant qui permet à l’auteur d’aborder des thèmes qui lui sont chers, tels que la mort paternelle, l’angoisse, la dépression et l’automutilation. Un tome qui permet de plonger dans la noirceur de la nature humaine, dans la spirale auto-destructrice d’un homme privé d’amour paternel et vite qualifié « hors norme » par une société dont il cherche à se libérer. Au bout de cette torture psychologique et de cette recherche de liberté, une seule solution s’impose… une bouée de sauvetage pour cette vie et pour toutes les suivantes… une envie d’en finir à tout jamais… un adieu ponctué de mots qui témoignent de l’ampleur de sa souffrance : « Pourvu que les Bouddhistes se trompent… ».

Et pour couronner le tout, le récit est ponctué d’un épilogue qui apporte un nouvel éclairage sur l’ensemble des événements, qui permet de mieux comprendre ce qu’il se passe dans la tête de Polza Mancini lors de ses BLAST et qui appelle à une nouvelle lecture des quatre tomes de cette perle du neuvième art.

Graphiquement, nuançant le noir et le blanc avec brio, Manu Larcenet livre une ambiance sombre et glauque et des personnages répugnants, mais d’une grande expressivité. Si les dialogues lors de l’interrogatoire sont accrocheurs et les monologues du personnage central prenant, les moments plus contemplatifs et les silences proposés par l’auteur allient force et splendeur. Et que dire de ces dessins d’enfants (les siens), tout en couleurs, qui viennent interrompre le ballet grisâtre pendant les BLAST ? Ces quelques passages en couleur sont distillés avec justesse et parcimonie et accompagnent avec brio ces moments où Polza se déconnecte totalement de la réalité. Après les collages réalisés par Polza à l’hôpital psychiatrique lors du tome précédent et ces étranges tableaux qui semblaient exprimer sa propre souffrance, Manu Larcenet proposent de nouvelles trouvailles visuelles lors de cette conclusion qui démêle toutes les intrigues. Il y a tout d’abord les strips de « Jasper l’ours bipolaire » dessinés par son ami Ferri, mais il y a surtout ces nouveaux collages qui illustrent avec maestria les pulsions sexuelles perverses de Roland Oudinot.

Chef-d’œuvre, ovni, série coup de poing, grosse claque ou BLAST… faites votre choix, mais peu importe le terme choisi, cette saga ne laissera personne indifférent !

Retrouvez cet album dans mon Top de l’année et dans mon Top du mois !

Une lecture commune que je partage avec Yaneck !

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Daniel Pennac et Manu Larcenet – Journal d’un corps

Posted in BANDES DESSINÉES, BD du mercredi, Franco-Belge, Futuropolis, Littérature, Maladie, Manu Larcenet, One-shots, [DL 2013], [Sélectif] with tags , , , on 29 mai 2013 by Yvan

La vie d’un homme à travers son corps

Daniel Pennac et Manu Larcenet - Journal d’un corpsCe « Journal d’un corps » emmène le lecteur en terrain connu car le personnage central est un corps. C’est suite à une grosse frayeur, qui l’a poussé à se faire dessus lors d’un camp scout, que le propriétaire anonyme de ce corps décide de coucher sur papier les surprises que lui réserve l’organisme. Devenu haut fonctionnaire à la retraite, il expédiera son journal post mortem à sa fille Lison. De treize à quatre-vingt-sept ans, de sa tendre enfance jusqu’à la mort, il tentera de comprendre et d’apprivoiser son corps.

L’épopée de ce corps n’épargne pas grand-chose au lecteur. De la varicelle au cancer, en passant par les polypes, la libido, les acouphènes, les flatulences, les bâillements, le vomi, les érections, la prostate, les caries, les crottes de nez et les cors au pied, le fonctionnement et les dysfonctionnements de ce corps permettent d’aborder la vie de cet homme de 1936 à 2010. Par le biais d’un corps, le lecteur partage le vécu du narrateur, de la puberté à la tombe. On aurait d’ailleurs aimé en apprendre plus sur la vie de cet homme, mais, malgré quelques digressions plus proches de l’âme que du corps, l’auteur a fait de son mieux pour s’en tenir au cahier des charges initial en se concentrant principalement sur les manifestations de son organisme.

« Ce soir, merde molle et collante. Deux chasses d’eau ne suffisent pas à décoller les chiures sur la céramique ni à effacer les traces brunes au fond de la cuvette. »

Profitant de la totalement liberté laissée par Daniel Pennac, Manu Larcenet ne se contente pas d’illustrer le roman de l’auteur, mais préfère partager ses perceptions et ses sentiments ressentis lors de la lecture. Le dessinateur choisit donc les passages qui l’ont touché dans le texte et les illustre parfois de manière littérale, parfois de manière amusante, mais toujours avec grande justesse.

Ils en parlent également : Mo’, PaKa

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Manu Larcenet – BLAST, La tête la première

Posted in BANDES DESSINÉES, BD du mercredi, Dargaud, Franco-Belge, Manu Larcenet, Séries, [Avancé], [DL 2012], [Terminées] with tags , on 24 octobre 2012 by Yvan

FONCEZ, la tête la première !

Manu Larcenet – BLAST, La tête la premièreCe nouveau pavé de 200 pages, troisième volet d’une série qui n’en prévoit plus que quatre, poursuit l’interrogatoire de Polza Mancini, toujours en garde à vue pour les méfaits qu’il a commis. Les policiers tentent de reconstruire le puzzle des événements et si la culpabilité du suspect ne fait aucun doute, les motivations de son acte barbare demeurent cependant inconnues.

A coup de flashbacks, le lecteur poursuit le compte-rendu de cet homme qui a abandonné son foyer pour se mettre en marge de la société, à la recherche du BLAST, cet état second qui lui permet de s’évader d’une réalité qui ne lui a jamais vraiment souri. Une descente aux enfers certes rythmée par la prise d’alcool, de médicaments et de drogues, mais également accompagnée d’une bouffée de liberté et d’une communion avec la nature et marquée par quelques rencontres surprenantes. Après sa rencontre avec Jacky Jourdain, un dealer SDF, lors du tome précédent, Polza Mancini poursuit son errance auto-destructrice. Une descente aux enfers qui passe par un séjour à l’hôpital psychiatrique et par sa rencontre avec Roland Oudinot et ses merveilleux Moaïs, mais qui le rapproche surtout de Carole… celle qu’on le soupçonne d’avoir tuée.

Manu Larcenet prend à nouveau tout son temps pour narrer l’histoire de son personnage, alternant des passages muets pourvus d’une grande force évocatrice et des passages plus verbeux où chaque mot semble néanmoins pesé. Une justesse narrative qui permet de toucher à la personnalité de cet homme et d’aller bien au-delà de sa grasse carcasse, créant énormément d’empathie envers cet homme au casier judiciaire presque aussi imposant que sa masse corporelle. Physiquement, l’homme obèse et répugnant n’a rien pour plaire, mais dans le fond, cet écrivain de profession a quelque chose de poétique et de touchant. C’est avec grand intérêt que le lecteur accompagne l’errance de cet individu en rupture avec la société et qui, depuis sa « tendre » enfance est mis à l’écart. Le but de ce long voyage introspectif est la recherche du prochain BLAST, cet instant magique où il s’évade de son corps pour entrer en communion avec le monde, ce sentiment de plénitude qui, un bref instant, le libère de tous ses maux. Usant d’une narration proche de la perfection, l’homme se livre, partage ses angoisses, ses divagations, ses malaises vis-à-vis de la société et ses réflexions sur le sens de la vie. Un parcours (sur)prenant qui permet à l’auteur d’aborder des thèmes qui lui sont chers, tels que la mort paternelle, l’angoisse, la dépression, l’automutilation et le rejet de l’obésité. Un tome qui permet de plonger dans la noirceur de la nature humaine, dans la spirale auto-destructrice d’un homme privé d’amour paternel et vite qualifié « hors norme » par une société qu’il cherche de plus en plus à quitter… la tête la première.

Graphiquement, nuançant le noir et le blanc avec brio, Manu Larcenet livre une ambiance sombre et glauque et des personnages répugnants, mais d’une grande expressivité. Si les dialogues lors de l’interrogatoire sont accrocheurs et les monologues du personnage central prenant, les moments plus contemplatifs et les silences proposés par l’auteur allient force et splendeur. Et que dire de ces dessins d’enfants (les siens), tout en couleurs, qui viennent interrompre le ballet grisâtre pendant les BLAST ? Ces quelques passages en couleur sont distillés avec justesse et parcimonie. Des collages réalisés par Polza à l’hôpital psychiatrique aux tableaux qui semblent exprimer sa propre souffrance, Larcenet livre un album visuellement exceptionnel.

Découvrez également la bande annonce de ce chef-d’œuvre que vous retrouverez également très bien classé dans mon Top de l’année :

Ils en parlent également : Noukette

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Manu Larcenet – Valérian, vu par…

Posted in BANDES DESSINÉES, Dargaud, Festival BD Angoulême, Franco-Belge, Manu Larcenet, One-shots, [Accessible], [Angoulême 2012], [DL 2011] with tags , on 11 novembre 2011 by Yvan

Valérian n’est qu’un gros poivrot bedonnant !

Manu Larcenet - Valérian, vu par...Qui ne connaît pas l’histoire de Valérian et Laureline, véritable référence en matière de science-fiction, signée Christin et Mézières ? Ben moi ! Mais néanmoins bien décidé d’attaquer cet album signé Manu Larcenet (dans un genre qui n’est pas forcément mon genre de prédilection), j’effectue vite un petit détour par Wikipedia pour connaître les bases de l’histoire avant d’attaquer cette revisite par l’auteur des incontournables Blast et Le Combat ordinaire.

L’avantage de ne pas connaître la série originelle est que je ne risque pas d’être choqué par ce que Manu Larcenet réserve comme sort au célèbre agent spatio-temporel. Il faut dire que le héros est plutôt malmené par l’auteur. Dès les premières pages, on le retrouve bedonnant et accoudé au bar de Chez Francisque en compagnie d’un autre poivrot qui n’a rien d’un héros intergalactique. Ce contre-pied brillantissime ne manquera pas de faire crier les plus grands fans au sacrilège, mais personnellement j’ai plutôt apprécié cet exercice totalement décalé et débordant d’humour. Et la science-fiction me direz-vous ? Pas de panique, car notre héros s’envole très vite à bord d’épicerie arabe spatiale à la rencontres de planètes lointaines, d’extra-terrestres étranges et d’aventures rocambolesques. Mission accomplie, en ce qui me concerne !

Le risque de ne pas connaître la série originelle était par contre d’être largué par l’histoire, mais ce ne fut pas le cas car Larcenet parvient à livrer une histoire totalement indépendante qui s’approprie les personnages et l’univers de Valérian. Alors certes, j’ai peut-être loupé l’une ou l’autre référence/allusion, mais rien qui n’empêche de profiter pleinement de ce one-shot totalement déjanté, pourvu de dialogues assez loufoques.

Au niveau du graphisme, l’album multiplie les personnages aux trognes caricaturales au sein de décors intersidéraux particulièrement réussis. La colorisation somptueuse de Jeff Pourquié ponctue cet exercice divertissant, amusant et efficace.

En attendant le tome suivant de cette revisite, il ne me reste donc plus qu’à lire la série de Christin et Mézières.

Retrouvez cet album dans mon Top de l’année !

Manu Larcenet – BLAST, L’apocalypse selon Saint Jacky

Posted in BANDES DESSINÉES, Dargaud, Franco-Belge, Manu Larcenet, Séries, [Avancé], [DL 2011], [Terminées] with tags , on 22 avril 2011 by Yvan

Sentiment de liberté en marge de la société !

Manu Larcenet – BLAST, L'apocalypse selon Saint JackyCe nouveau pavé de 200 pages, deuxième volet d’une série qui en prévoit cinq, poursuit l’interrogatoire de Polza Mancini, toujours en garde à vue pour les méfaits qu’il a commis. Les policiers tentent de reconstruire le puzzle des événements et si la culpabilité du suspect ne fait aucun doute, les motivations de son acte barbare demeurent cependant inconnues.

A coup de flashbacks, le lecteur poursuit le compte-rendu de cet homme qui a abandonné son foyer pour se mettre en marge de la société, à la recherche du BLAST, cet état second qui lui permet de s’évader d’une réalité qui ne lui a jamais vraiment souri. Une descente aux enfers certes rythmée par la prise d’alcool, de médicaments et de drogues, mais également accompagnée d’une bouffée de liberté et d’une communion avec la nature et marquée par quelques rencontres surprenantes. Dans ce deuxième volet, c’est surtout la rencontre avec Jacky Jourdain, un dealer SDF, qui va intéresser les policiers et procurer un nouveau BLAST à Polza, suite à une consommation d’héroïne.

Manu Larcenet prend à nouveau tout son temps pour narrer l’histoire de son personnage, alternant des passages muets pourvus d’une grande force évocatrice et des passages plus verbeux où chaque mot semble néanmoins pesé. Une justesse narrative qui permet de toucher à la personnalité de cet homme et d’aller bien au-delà de sa grasse carcasse, créant énormément d’empathie envers cet homme au casier judiciaire presque aussi imposant que sa masse corporelle. Physiquement, l’homme obèse et répugnant n’a rien pour plaire, mais dans le fond, cet écrivain de profession a quelque chose de poétique et de touchant. C’est avec grand intérêt que le lecteur accompagne l’errance de cet individu en rupture avec la société et qui, depuis sa « tendre » enfance est mis à l’écart. Un long voyage introspectif à la recherche du prochain BLAST, cet instant magique où il s’est évadé de son corps pour entrer en communion avec le monde, ce sentiment de plénitude qui, un bref instant, le libère de tous ses maux. Usant d’une narration proche de la perfection, l’homme se livre, partage ses angoisses, ses divagations, ses malaises vis-à-vis de la société et ses réflexions sur le sens de la vie. Un parcours (sur)prenant qui permet à l’auteur d’aborder des thèmes qui lui sont chers, tels que la mort paternelle, l’angoisse, la dépression, l’automutilation et le rejet de l’obésité.

Graphiquement, nuançant le noir et le blanc avec brio, Manu Larcenet livre une ambiance sombre et glauque et des personnages répugnants, mais d’une grande expressivité. Si les dialogues lors de l’interrogatoire sont accrocheurs et les monologues du personnage central prenant, les moments plus contemplatifs et les silences proposés par l’auteur allient force et splendeur. Et que dire de ces dessins d’enfants (les siens), tout en couleurs, qui viennent interrompre le ballet grisâtre pendant les BLAST ? Merveilleux !

Vivement le prochain BLAST !

Retrouvez cette BD dans MON TOP 2011 !