Archive for the DIVERS Category

Grégoire Delacourt – Une nuit particulière

Posted in Littérature with tags on 17 mars 2023 by Yvan

Une nuit d’amour intense et éphémère !

Grégoire Delacourt - Une nuit particulièreAprès un dixième roman introspectif et personnel, où Grégoire Delacourt  se mettait à nu tout en tentant de réparer un traumatisme d’enfance, l’auteur offre ici un roman d’amour qui se déroule le temps d’une nuit…particulière. Loin de l’amour abjecte de « L’enfant réparé », il nous sert ici le véritable amour, le beau, l’inconditionnel, le lumineux…même s’il s’avère également tragique et éphémère.

Aurore, 55 ans, arpente les rues de Paris à la recherche d’une rencontre qui lui permettra d’échapper au gouffre qui vient d’avaler tout son être. Après trente ans d’un amour passionnel, son mari la quitte. Pendant qu’il quitte définitivement leur appartement, elle erre dans la capitale, demande du feu à un inconnu, lui prend la main et lui demande de l’emmener…   

Une nuit, deux personnages qui déambulent dans la ville le temps d’une rencontre improbable, où deux solitudes cherchent à se combler. Deux êtres au bord du précipice, voire déjà en train de sombrer, qui décident, sur un coup de tête, de remplir leurs vides respectifs d’un amour aussi intense qu’éphémère. 

Racontée du point de vue d’Aurore, puis de Simeone, l’histoire invite à croiser l’amour sous plusieurs formes. Se glissant tout d’abord dans la peau d’une femme, puis dans celle d’un homme, Grégoire Delacourt nous plonge dans leur intimité, mêlant sentiments crus et poésie. Sacrifiant souvent la crédibilité des dialogues au profit du sens de la formule, l’auteur parvient néanmoins à transmettre beaucoup d’émotions en nous parlant d’amour…  

Une nuit particulière,  Grégoire Delacourt, Grasset, 200 p., 19€

Pauline Hillier – Les Contemplées

Posted in Littérature with tags , on 15 mars 2023 by Yvan

La sororité carcérale !

Pauline Hillier - Les ContempléesLe 29 mai 2013, Pauline Hillier fait partie du groupe féministe Femen qui manifeste seins-nus devant le palais de justice de Tunis en soutien à Amina Sbouï. En revendiquant la libération de la militante tunisienne, la jeune bordelaise terminera à la Manouba, privée de sa propre liberté dans la plus grande prison de femmes de Tunisie. Pavillon D, une cellule nauséabonde à partager avec vingt-huit co-détenues, accompagnée d’un livre qu’elle a miraculeusement pu garder, « Les contemplations » de Victor Hugo, qui sera à l’origine du titre de cet ouvrage et dans lequel elle prendra les notes qui serviront de base à ce témoignage.

« Les Contemplées » est donc tout d’abord un récit carcéral qui immerge le lecteur dans un environnement insalubre, grouillant de cafards et de rats, où les prisonnières doivent survivre dans des conditions d’hygiène totalement rudimentaires et profondément dégradantes. Un huis clos où l’on souffre de malnutrition, d’humiliations en tout genre, de promiscuité, de fouilles à nu outrageuses et de violences régulières de la part des gardiennes.

« Les Contemplées » aurait donc pu se limiter à un témoignage autobiographique visant à dénoncer les conditions d’emprisonnement au cœur d’une société patriarcale bafouant les droits fondamentaux des femmes, mais Pauline Hillier a cependant choisi d’occulter la présence de ses deux consœurs Femen, pourtant incarcérées avec elle, pour nous parler des femmes tunisiennes qui ont partagé son quotidien.

Ayant quelques notions de chiromancie, la narratrice va progressivement se faire une petite place parmi ses co-détenues en leur lisant les lignes de la main. Une main ouverte et tendue vers le partage du peu de biens qu’elles détiennes, mais surtout des histoires qu’elles ont en commun. La plupart ont beau être innocentes (comme c’est souvent le cas en prison, surtout celles-là), elles sont néanmoins toutes coupables du même crime : être née femme dans un monde dirigée par les hommes !

Grâce à la plume Pauline Hillier, Boutheina, Fuite, Hafida, Warda, Fazia, Samira, la Cabrane et les autres prisonnières se transforment en héroïnes de roman, illuminant cet environnement inhumain de leur humanité, traversant notre ligne de vie pour se graver à jamais dans notre esprit. Là, dans ce pénitencier où les femmes rebelles doivent être oubliées, voire même effacées de la société, des portraits foncièrement attachants sont brossés, tout en dénonçant la condition féminine en Tunisie et en rendant hommage à la merveilleuse sororité qui nait parmi ces femmes victimes du pire…

Finalement, « Les Contemplées » est un récit de transmission, d’histoires de femmes qu’il ne faut pas oublier…

Les Contemplées, Pauline Hillier, La Manufacture de Livres, 184 p., 18,90€

Amanda Skenandore – Pour l’honneur de tous les miens

Posted in Littérature with tags on 11 mars 2023 by Yvan

L’assimilation utopique des jeunes indiens !

Amanda Skenandore - Pour l'honneur de tous les miensDerrière cette couverture qui ne colle pas du tout au contenu, se dissimule un récit inspiré de faits réels, qui dénonce l’assimilation forcée des enfants indiens aux Etats-Unis à la fin du dix-neuvième siècle.

En 1880, la petite Alma attend avec grande impatience les jeunes indiens qui viendront apprendre à se comporter comme un « Blanc » à la Stover School. Son père étant à la tête de cette école visant à américaniser les petits autochtones, elle compte d’ailleurs bien les aider en montrant le bon exemple.

En 1906, Alma Mitchell découvre dans le journal du jour qu’un de ses amis d’enfance risque la pendaison pour le meurtre d’un agent fédéral. Ne pouvant pas concevoir qu’Asku, rebaptisé Harry Muskrat en entrant à la Stover School, puisse être coupable d’un tel acte, elle supplie son mari, avocat, de lui venir en aide…

« Pour l’honneur de tous les miens » invite donc à découvrir un pan de l’Histoire amérindienne assez méconnu. Une époque où les petits indiens étaient arrachés à leurs familles pour intégrer des pensionnats visant à les dépouiller de leurs racines, de leurs croyances, de leurs langues, de leurs tenues, de leurs coiffures et même de leurs noms. Une assimilation forcée, totalement immorale et souvent brutale, qui les dépouillait de leur identité pour transformer ces petits « sauvages » en bons Américains…

La grande force de ce récit est sa double temporalité qui invite à découvrir les deux points de vue d’Alma au fil des chapitres. Il y a tout d’abord cette petite fille naïve et totalement innocente, qui constate certes les maltraitances et les injustices dont sont victimes ses camarades de classe, mais qui est foncièrement persuadée du bien fondée de cette éducation. Mais il y a surtout la prise de conscience de l’Alma adulte, qui finit par constater les limites de l’avenir qui leur était promis au cœur d’une Amérique foncièrement raciste, pas du tout encline à intégrer ces peaux-rouges, même civilisés…

Servi par une belle plume, ce qui est bien la moindre des choses lorsqu’on relate la terrible destinée des Indiens, « Pour l’honneur de tous les miens » est donc à la fois le récit d’amitié d’une petite fille condamnée à vivre entre deux mondes, mais également un récit sur la différence… cette satanée différence qui pousse chaque fois l’être humain à commettre les pires exactions et que ce genre d’ouvrage fait bien de rappeler afin de ne jamais les oublier…

Si vous aimez la bande dessinée, lisez également l’excellent « Hoka hey! » de Neyef, qui aborde le même sujet.

Pour l’honneur de tous les miens, Amanda Skenandore, Faubourg Marigny, 400 p., 21€

Elles/ils en parlent également : Aurélie, Audrey, Katia, Lily, Stéphanie

Cynthia Kafka – Je suis venue te dire

Posted in Littérature, Virginie Grimaldi with tags , on 8 mars 2023 by Yvan

Le dernier rendez-vous d’un père avec sa fille !

Cynthia Kafka - Je suis venue te direAyant repéré « Contre vents et secrets » de Cynthia Kafka dans un top de fin d’année, je me suis mis à la recherche de l’ouvrage mais comme j’avais uniquement noté le nom de l’auteure, je me suis finalement retrouvé avec celui-ci entre les mains. Une erreur donc…qui après lecture, ne s’en avère finalement pas du tout une !

Celle qui est venue dire dans le titre se nomme Rose, une jeune femme de vingt-huit ans qui en a gros sur la patate au moment où elle regagne sa ville natale après dix ans d’absence. Elle compte d’ailleurs bien saisir cette dernière opportunité qui s’offre à elle, d’enfin pouvoir dire ses quatre vérités à ce père démissionnaire, à qui elle avait tourné le dos, mais qui vient d’être admis en soins palliatifs…

En alternant passé et présent, Cynthia Kafka raconte d’une part le retour de Rose à Chantilly et ses derniers moments en compagnie de son père, tout en invitant d’autre part à découvrir le passé de cette héroïne qui a non seulement perdu sa mère à l’âge de quatre ans, mais qui s’est également progressivement éloignée de ce père qui a choisi de noyer son chagrin dans l’alcool, délaissant totalement sa fille.

« Je suis venue te dire » est donc le récit d’une relation, voire même d’une confrontation, entre un père et sa fille. À l’instar de Marie-Sabine Roger dans « Dernière visite à ma mère », Cynthia Kafka narre un ultime rendez-vous entre deux êtres qui souffrent d’un vide affectif rempli de non-dits. Une dernière occasion de libérer une parole enfouie depuis trop longtemps, une sorte d’exutoire qui permettra d’enfin tourner la page et de se reconstruire. Mais comment trouver les réponses tant désirées lorsque, arrivée au chevet de son père, elle constate que ce dernier est incapable de communiquer autrement que par quelques clignements d’yeux ?

« Je suis venue te dire » est donc l’histoire d’une reconstruction, celle de Rose, arrivée débordante de rancœur, espérant enfin trouver la paix intérieure qui lui permettra d’avancer. C’est également le récit d’un retour aux sources, qui renoue avec le passé et réveille des souvenirs enfouis, invitant souvent à les regarder sous un nouvel angle, avec le recul nécessaire.

« Je suis venue te dire » est également un récit d’amitiés, de personnages attachants qui se retrouvent après tant d’années et qui vont s’entraider et se rapprocher au fil des pages. Tout comme Rose, le lecteur finit par se sentir bien en compagnie de sa mamie, de sa tata et de cette amie d’enfance tellement solaire, dorénavant infirmière, qui illumine les soins palliatifs de sa bonne humeur.

Si vous aimez les romans “feel good” qui abordent des sujets aussi délicats que douloureux avec autant de légèreté que de justesse, tels que savent si bien le faire Virginie Grimaldi, Marie Pavlenko (« Je suis ton soleil », « Un si petit oiseau »)  ou Anna McPartlin (« Les derniers jours de Rabbit Hayes », « Du côté du bonheur »), n’hésitez pas et foncez !

Je suis venue te dire, Cynthia Kafka, L’Archipel, 304 p., 18€

Elles/ils en parlent également : Elodie, Anaïs, Ma voix au chapitre, Lettres et caractères

David Lelait-Helo – Poussière d’homme

Posted in Littérature with tags , on 4 mars 2023 by Yvan

Un cri d’amour éternel !

David Lelait-Helo - Poussière d’hommeC’est encore sous le charme de « Je suis la maman du bourreau » que je puise dans la biographie de cet auteur dont le style m’avait tant séduit et que j’apprends à mieux connaître à travers ce roman autobiographique on ne peut plus émouvant. Dans « Poussière d’homme », David Lelait relève en effet l’impossible défi de mettre des mots sur la douleur, l’absence et le manque engendrés par la perte de l’être aimé…   

Dans ce cri d’amour, l’auteur se souvient de leur rencontre, de leur vie à deux, de leurs dernières vacances en Grèce, mais également de cette terrible maladie qui a fauché l’homme de sa vie. Il nous raconte les derniers instants, la rencontre de cette belle-famille dont il avait été maintenu à l’écart et l’ultime voyage de cette urne refermant ce « nous » réduit en poussière…  

Un « nous » que l’auteur vient cependant prolonger à jamais à travers ce texte bouleversant, en y déposant des mots d’amour avec délicatesse, sensibilité, justesse et beaucoup de pudeur. Défiant cette mort qui a au moins le mérite de nous voir tous égaux, David Lelait fait perdurer un merveilleux cri d’amour… un amour qui se voulait masculin et discret, mais que l’on ressent universel et partagé de la plus belle des manières…

Poussière d’homme, David Lelait, Anne Carrière, 159 p., 15,30€

Elles/ils en parlent également : Little Pretty Books, Calypso, Mateiva

Mélissa Da Costa – La Doublure

Posted in Littérature with tags on 1 mars 2023 by Yvan

Thriller psychologique d’une noirceur extrême !

Mélissa Da Costa - La DoublureQuelle note donner à un roman dont j’entrevois toutes les qualités, mais qui ne m’a pas plu au point d’hésiter à le terminer ? C’est la question du jour, à laquelle je vais essayer de répondre au fil de ce retour moins positif qu’espéré… et que mérité… car comme dirait Confucius : « Lorsque l’on se cogne la tête contre un pot et que cela sonne creux, ce n’est pas forcément le pot qui est vide » !

La « doublure » dont il est question se nomme Evie Perraud, une jeune femme de vingt-trois ans à la recherche d’un nouvel emploi et d’une nouvelle vie, lorsqu’elle croise le chemin de Pierre Manan, un riche homme d’affaires qui cherche justement une assistante pour sa femme Clara, alias Calypso Montant, une artiste peintre en pleine ascension. Un job qui ne se limite pas à organiser des expositions et à répondre aux mails de l’artiste, mais qui consiste également à se faire passer pour Calypso Montant lors d’événements publics, en tant que doublure de cette patronne qui désire uniquement se consacrer à ses tableaux…

Bon certes, je ne suis pas particulièrement fan de peinture, mais la vue de « L’empire des lumières » au musée Magritte m’ayant laissé sans voix, je ne suis pas non plus réfractaire à cette plongée dans le monde de l’art proposée par Mélissa Da Costa. Sauf qu’ici, on baigne dans le romantisme noir, dans un univers sombre, malsain, pervers, morbide et glauque, parsemé de références à Goya, Baudelaire ou le marquis de Sade, beaucoup trop éloigné de ma réalité et dans lequel j’ai été réfractaire à me projeter.

Cette incapacité à pouvoir entrer dans le roman n’était pas uniquement dû à ce fond artistique beaucoup trop sombre, mais également à ce trio de personnages qui n’est pas parvenu à me séduire. J’ai eu du mal à comprendre la plupart des décisions d’Evie et n’ai pas du tout adhéré à ce triangle relationnel particulièrement toxique et destructeur, parsemé de drogues, de sexe et de manipulations. Du coup, j’ai beaucoup apprécié les quelques passages qu’Evie passait en compagnie de personnages secondaires, tels que Gaël et Irène, bien loin de l’emprise de ce couple diabolique.

Bref, ce virage entamé par Mélissa Da Costa (lisez « Tout le bleu du ciel »), loin du « feelgood » et de la normalité, propulsant le lecteur dans un thriller d’une noirceur et d’une violence psychologique extrêmes, m’a totalement laissé sur le bord de la route. Et c’est surtout dommage pour moi, car le talent d’écriture est là, la descente aux enfers finalement suffocante, le parallèle biblique entre Evie/Pierre/Clara et Eve/Adam/Lilith parfaitement exploité et le final particulièrement réussi.

La Doublure, Mélissa Da Costa, Albin Michel, 576 p., 20,90 €

Elles/ils en parlent également : Maeve, Audrey, Laurence, Karine, Jessica, Elodie, Virginie, Lily, Julie, Jean-Paul, Mag, Mes échappées livresques, Petite étoile livresque, Mes p’tits lus, Célittérature, Valmyvoyou

Freida McFadden – La femme de ménage

Posted in Littérature with tags , on 22 février 2023 by Yvan

Un thriller psychologique addictif !

Freida McFadden - La femme de ménageLa femme de ménage dont il est question dans le titre de ce thriller psychologique particulièrement addictif et machiavélique se nomme Millie. Obligée de vivre dans sa voiture suite à la perte de son travail et de son logement, Millie est de surcroît en liberté conditionnelle et donc obligée de retrouver un emploi au plus vite sous peine de retourner derrière les barreaux. Lorsqu’elle décroche un poste de gouvernante au sein une famille de riches new-yorkais, elle pense avoir décroché le gros lot…sauf qu’elle va très vite déchanter !

Le premier point fort de ce roman est sa construction qui débute par un prologue qui fait immédiatement comprendre qu’un drame terrible vient de se produire. Une fois hameçonné, le lecteur est ramené trois mois en arrière, au moment où Millie se fait embaucher comme femme de ménage. Puis, en changeant de narratrice en seconde partie de roman, Freida McFadden parvient à nous prendre complètement à contrepied, offrant un nouveau point de vue aussi surprenant qu’intéressant.

Outre cette construction parfaitement orchestrée, il faut également saluer l’ambiance oppressante qui s’installe dès les premières pages du récit. Du comportement étrange de la maîtresse de maison à ce petit logement sous les toits qui ne se ferme que de l’extérieur, le lecteur sent immédiatement que quelque chose ne tourne pas rond. Un sentiment de malaise qui s’accentue au fil des pages de ce huis-clos qui tient en haleine de la première à la dernière page.

Bref, un excellent thriller psychologique… qui se transformera même en coup de cœur si vous parvenez à passer outre ces quelques passages un peu trop capillo-tractés qui ont tendance à faire tanguer la crédibilité de l’ensemble.

La femme de ménage, Freida McFadden, City Edition, 304 p., 19,95€

Elles/ils en parlent également : Mélie, Hedwige, Audrey, Sandrine, Orlane, Lily, L’heure de lire, Bookinette