Archive pour Festival Angoulême

Serge Lehman et Frederik Peeters – L’Homme gribouillé

Posted in BANDES DESSINÉES, Delcourt, Franco-Belge, One-shots, [Accessible], [DL 2018] with tags , , on 20 janvier 2019 by Yvan

Thriller psychologique mâtiné de fantastique !

Serge Lehman et Frederik Peeters - L’Homme gribouilléSi je n’ai pas lu de bandes dessinées en 2018, je n’ai cependant pas pu résister à quelques titres aperçus dans les divers bilans de l’année, dont cette brique de plus de 300 pages signée Serge Lehman (« Brigades chimériques », « La saison de la couloeuvre  ») et Frederik Peeters (« RG », « Aâma », « Château de sable », « Koma »)… même si celle-ci date en fait de fin 2017.

« L’Homme gribouillé » s’immisce dans l’histoire de trois générations de femmes : Maud, la grand-mère écrivaine célèbre, Betty, la mère aphasique qui travaille dans une maison d’éditions et Clara, la petite-fille adolescente débordante d’énergie qui adore également raconter des histoires. Lorsque Maud fait un AVC et qu’un mystérieux individu au costume d’oiseau exige violemment un paquet qui lui serait dû, c’est le début d’un voyage initiatique qui emmène le lecteur dans le Jura, dans leur village d’origine, sur la piste d’un extraordinaire secret de famille…

Le scénario imaginé par Serge Lehman allie non seulement densité et fluidité, mais s’avère de surcroît haletant de la première à la dernière page. Ce thriller psychologique mâtiné de fantastique mêle habilement secrets familiaux, légendes urbaines et psycho-géographie, tout en proposant des personnages extrêmement attachants. Outre une intrigue prenante et intelligemment construite, il faut également saluer le travail une nouvelle fois remarquable de Frederik Peeters au dessin. Ses planches noyées sous des pluies diluviennes ou émergeant de brumes épaisses insufflent une atmosphère surnaturelle et envoûtante à l’ensemble. Le choix du noir et blanc s’avère à ce titre assez judicieux et permet à l’auteur de démontrer sa capacité à jouer avec les ombres.

Un coup de cœur !

Killoffer – Tel qu’en lui-même enfin

Posted in BANDES DESSINÉES, Franco-Belge, L'Association, One-shots, [Angoulême 2016], [DL 2015], [Sélectif] with tags , , on 15 février 2016 by Yvan

Une autobiographie autodestructrice !

Killoffer - Tel qu'en lui-même enfinLe titre de cet ouvrage annonce immédiatement la couleur et ceux qui connaissent un peu l’artiste ne s’étonneront probablement pas d’être invité à entrer dans sa peau.

Chaque planche de ce recueil, qui reprend les pages parues dans la revue mensuelle le Tigre entre 2010 et 2015, débute d’ailleurs par les mots « Killoffer en… », permettant notamment de découvrir l’artiste en Killoffer, mais surtout en enfer. Le garçon n’est en effet pas tendre avec lui-même et au bout de 108 pages d’autocritique et d’autoflagellation bien appuyée, il ne reste plus grand-chose de l’illustrateur adulé. Chaque saynète est servie sous la forme d’un gaufrier à huit cases, accompagné d’une illustration en page de gauche qui fait admirablement écho à la planche de droite.

Le gros problème, lorsqu’on s’enfile toutes ces histoires courtes qui contribuent à dresser le portrait peu reluisant de l’auteur, d’un seul coup, c’est que l’écœurement et la saturation finissent par être au rendez-vous. De plus, l’empathie éventuelle envers le personnage principal disparaît inévitablement au fil du récit. C’est même plutôt l’envie de sortir de la peau de cet homme dépressif et porté sur une boisson qu’il n’a pas forcément bonne qui augmente au fil des pages. C’est un peu dommage car ce trip narcissique est illustré avec une virtuosité incroyable et une maîtrise du noir et blanc assez impressionnante.

Arrivé à la fin de l’album, le graphisme donne donc forcément envie d’encenser l’artiste, mais le contenu autodestructeur me donne plutôt envie de lui mettre deux paires de tartes…

Festival Angoulême 2016 – Sélection officielle

Posted in BANDES DESSINÉES, Festival BD Angoulême, [Angoulême 2016], [DL 2015] with tags , on 14 février 2016 by Yvan

La Sélection officielle 2016 !

festival angoulemeRetrouvez la liste des 40 bandes dessinées nominées dans la Sélection officielle 2016 ci-dessous.

J’ai mis un peu plus de temps à la publier cette année, mais c’est parce que j’avais beaucoup de retard de lecture. Là, j’ai lu tous ceux qui se trouvaient sur ma pile, même si je vais probablement encore lire « Chiisakobe » et « Letter 44 ».

Y en a-t-il d’autres que je devrais absolument lire ?
               

Ajin T1 par Gamon Sakurai & Tsuina Miura (Glénat)
– Allo, Dr Laura ? Mémoires graphiques par Nicole J. Georges (Cambourakis)
L’Arabe du futur T. 2 par Riad Sattouf (Allary)
– Arsène Schrauwen par Olivier Schrauwen (L’Association)
– Carnet de santé foireuse par Pozla (Delcourt)
Catharsis par Luz (Futuropolis)
Cher Pays de notre enfance par Étienne Davodeau & Benoît Collombat (Futuropolis)
– Chiisakobe T1 par Minetaro Mochizuki (Le Lézard noir)
– Combats par Daniel Goossens (Fluide Glacial)
– Doctors par Dash Shaw (Çà et là)
– En Temps de guerre par Delphine Panique (Misma)
Esprits des morts & autres récits d’Edgar Allan Poe par Richard Corben (Delirium)
– Est-ce qu’on pourrait parler d’autre chose ? par Roz Chast (Gallimard)
– Une Étoile tranquille – Portrait sentimental de Primo Levi par Pietro Scarnera (Rackham)
La Favorite par Matthias Lehmann (Actes Sud)
La Fille de la plage T1 par Inio Asano (IMHO)
– Fin par Anders Nilsen (Atrabile)
– Hans Fallada – Vie et mort du buveur par Jakob Hinrichs (Denoël Graphic)
– Hiver rouge par Anneli Furmark (Çà et là)
Ici par Richard McGuire (Gallimard)
– Les Intrus par Adrian Tomine (Cornélius)
– Joker par Benjamin Adam (La Pastèque)
– Letter 44 T.1 par Alberto Jiménez Albuquerque & Charles Soule (Glénat Comics)
Megg, Mogg & Owl, T2 : Magical Ectasy Trip par Simon Hanselmann (Misma)
– Mortelle vinasse par Mai-Li Bernard (The Hoochie Coochie)
Ms. Marvel T1 par Gwendolyn Willow Wilson & Adrian Alphona (Panini)
– Murderabilia par Alvaro Ortiz (Rackham)
– Nimona par Noelle Stevenson (Dargaud)
Outcast T1 par Paul Azaceta Robert Kirkman (Delcourt)
Un Père vertueux par Ludovic Debeurme (Cornélius)
– Paci T3 par Vincent Perriot (Dargaud)
Le Piano oriental par Zeina Abirached (Casterman)
– La Renarde par Marine Blandin et Sébastien Chrisostome (Casterman)
– La République du catch par Nicolas de Crécy (Casterman)
Saga T4 par Fiona Staples et Brian K. Vaughan (Urban Comics)
Tel qu’en lui-même enfin par Killoffer (L’Association)
– Tu mourras moins bête T4 par Marion Montaigne (Delcourt)
– Tumultes par Hugues Micol (Cornélius)
Unlucky Young Men T1 par Kamui Fujiwara & Eiji Otsuka (Ki-oon)
Vive la marée ! par David Prudhomme & Pascal Rabaté (Futuropolis)

Bref, il m’en reste encore plusieurs à lire !

Voici déjà les avis de ceux que j’ai lu parmi cette sélection.

Retrouvez mon Best of parmi cette sélection et parmi les précédentes !

Jetez un oeil à cette sélection sur le site officiel du Festival !

Benoit Collombat et Etienne Davodeau – Cher pays de notre enfance

Posted in BANDES DESSINÉES, Davodeau, Festival BD Angoulême, Franco-Belge, Futuropolis, One-shots, [Accessible], [Angoulême 2016], [DL 2015] with tags , on 10 février 2016 by Yvan

Tous pourris !

Benoit Collombat et Etienne Davodeau - Cher pays de notre enfanceBenoît Collombat, grand reporter à France Inter, avait déjà enquêté sur les dessous de la Ve République avec « Un homme à abattre – Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin » et il s’associe ici avec un grand habitué des documentaires en BD : Etienne Davodeau (Rural, Les Mauvaises gens, Les Ignorants). Ensemble, ils reviennent sur plusieurs affaires non-résolues (lisez : jetées aux oubliettes) des années 70.

Du braquage de l’Hôtel des Postes à Strasbourg par le Gang des Lyonnais en 1971 à la tuerie d’Auriol en 1981, en passant par les assassinats du juge Renaud en 1975 et du ministre Robert Boulin en 1979, le duo s’attaque à des « Cold case » qui dérangent car elles éclaboussent de nombreux hommes politiques de l’époque et une organisation en particulier : le Service d’Action Civique (SAC), dont l’ombre plane sur toutes les affaires.

Le lecteur a donc droit à un véritable documentaire de plus de 200 pages, mêlant interviews, témoignages d’époque et même lectures d’archives. L’aspect bavard, particulièrement chargé en informations, de cette accumulation d’entretiens pourra certes rebuter certains lecteurs, mais ce que l’on apprend est absolument sidérant. Même pour moi, qui ne m’intéresse pas trop à la politique et encore moins à celle de la France, cette enquête dessinée m’a permis de mieux comprendre le contexte politique de l’époque. De plus, en nous replongeant dans plusieurs affaires de meurtres, les auteurs confèrent un côté polar à leur documentaire. Ils sautent certes d’un évènement à l’autre au fil des chapitres, mais conservent néanmoins l’ombre du SAC comme fil conducteur. Il devient en effet vite clair que c’est cette milice de mouvance gaulliste qui s’occupait des basses besognes du régime à l’époque, allant même jusqu’à assassiner des ministres. Il n’y a donc pas que l’Italie qui a connu des « années de plomb » dans les années 70 ! Edifiant !

Visuellement, on reconnaît immédiatement le style graphique d’Etienne Davodeau, qui n’a plus à prouver son efficacité sur ce genre de récits.

La douce France de Trenet se prend une belle claque avec cette enquête qui continue de déranger, 40 ans après les faits !

Richard McGuire – Ici

Posted in BANDES DESSINÉES, Comics, Gallimard, One-shots, [Angoulême 2016], [DL 2015], [Sans super-héros] with tags , on 5 février 2016 by Yvan

Le temps qui passe…

Richard McGuire - Ici« Ici, maintenant » raconte l’histoire d’une pièce sur des milliers d’années. Richard McGuire nous invite donc à contempler un plan fixe durant 300 pages et s’amuse à nous montrer ce qui se déroule à l’endroit où se situe ce salon à travers le temps, des dinosaures au futur.

Cette aventure temporelle ne se limite néanmoins pas à nous montrer l’évolution du temps d’une case à l’autre comme lors d’une narration linéaire classique, mais mélange des scènes empruntées à différentes époques au sein d’une même case. Ces strates temporelles qui se chevauchent se font parfois écho, mais la plupart du temps, le seul lien qui les unit est le lieu où elles se déroulent.

Si ce récit au décor unique parvient à saisir le temps qui passe et va bien au-delà de l’histoire de ce lieu, je n’ai malheureusement pas accroché aux banalités qui s’y déroulent. Les scènes que l’auteur montre ne semblent mener nulle part et les dialogues n’ont aucune valeur narrative. Arrivé à la fin de cette œuvre, il ne reste donc rien à retenir et pour quelqu’un comme moi, qui se nourrit surtout des histoires qu’il lit et est moins sensible à l’aspect conceptuel, c’est trop peu. Les autres s’enthousiasmeront probablement en soulignant la force de cette œuvre qui démontre qu’au fil du temps tout finit par s’effacer et que nous ne sommes finalement que peu de choses…

Si j’applaudis le concept, je retiendrai malheureusement surtout les longueurs qui ont accompagné la contemplation de cet enchevêtrement de scènes d’une banalité extrême.

Ils en parlent également: Moka, Noukette, Mo’

Rémi Farnos – Alcibiade

Posted in BANDES DESSINÉES, Franco-Belge, La Joie De Lire, One-shots, [Accessible], [Angoulême 2016], [DL 2015] with tags , , on 3 février 2016 by Yvan

Voyage initiatique particulièrement réussi !

Rémi Farnos - AlcibiadeCe conte initiatique invite à suivre les pas du jeune Alcibiade, qui quitte son village, baluchon à l’épaule. Le garçon se lance en effet dans un long périple vers l’Est ayant pour but de connaître son destin en allant questionner le grand sage. Ce voyage ponctué de rencontres, de découvertes et de nombreux obstacles ne déborde certes pas d’originalité au niveau de l’histoire, mais il parvient néanmoins à se démarquer des autres ouvrages du genre au niveau de la narration visuelle.

Cette quête de soi qui invite à suivre la destinée d’un héros qui finit par créer sa propre légende en forgeant son destin au fil des épreuves, est en effet graphiquement très réussie. Les planches découpées en gaufrier de vingt cases miniatures invitent non seulement à suivre les déplacements d’Alcibiade au gré de ses pérégrinations, modifiant ainsi régulièrement le sens de lecture, mais représentent également un dessin plus grand au sein duquel le héros évolue de case en case. Cette lecture presque interactive est franchement bien ficelée car il est rare que le lecteur se perde en cours de route. Reste à voir si même les plus jeunes parviendront à recomposer aussi facilement les nombreux puzzles imaginés avec grand soin par l’auteur.

Une excellente découverte éditée par La Joie De Lire dans leur collection Somnambule.

Découvrez aussi le site de l’auteur: http://www.remifarnos.com

Ils en parlent également : Lunch

Luz – Catharsis

Posted in BANDES DESSINÉES, Franco-Belge, Futuropolis, One-shots, [Angoulême 2016], [Avancé], [DL 2015] with tags , on 1 février 2016 by Yvan

La résurrection lente et pénible d’un dessinateur psychologiquement détruit !

Luz - CatharsisJ’ai donc attendu un peu plus d’un an après les événements dramatiques de Charlie Hebdo pour revenir sur cet album qui relate la résurrection lente et pénible d’un dessinateur épargné physiquement par le drame, mais psychologiquement ravagé.

Luz n’est pas seulement le dessinateur de cet album, c’est aussi celui qui a osé se moquer du Prophète Mahomet en couverture de Charlie Hebdo. C’est pourtant lui qui arrivera en retard à la réunion de rédaction du 7 janvier 2015, le jour de son 43ème anniversaire, échappant ainsi de justesse au massacre perpétré par les frères Kouachi au nom d’Allah. Arrivé sur place quelques minutes après le drame, il découvre ses confrères et amis gisant dans un bain de sang. Ils sont morts… lui se relèvera, mais cela prendra beaucoup de temps…

À ce titre, cet album est une sorte de thérapie, où l’auteur se livre et se met à nu. Du « tak tak tak » des kalachnikovs des frères Kouachi à cette protection rapprochée qui ne le lâche pas d’une semelle, en passant par Ginette, sa boule au ventre, Luz partage ce qu’il ressent. Il nous donne les clés de son mental et invite à constater les dégâts : du choc de la découverte de la tragédie à ses crises, en passant par la difficulté de retrouver son dessin ou le goût de vivre…

« Un jour, le dessin m’a quitté. Le même jour qu’une poignée d’amis chers. A la différence qu’il est revenu, lui. Petit à petit. A la fois plus sombre et plus léger. Avec ce revenant, j’ai dialogué, pleuré, ri, hurlé, je me suis apaisé à mesure que le trait s’épurait. »

Un incontournable de 2015 !

Ils en parlent également: Dionysos