Philippe Lançon – Le Lambeau
Une mise à nu bouleversante !
Journaliste à Libération et rescapé de l’attentat de Charlie Hebdo du 7 janvier 2015, Philippe Lançon revient sur la tuerie qui lui a arraché la partie inférieure du visage et sur la lente reconstruction physique et morale qui a suivie.
Le récit démarre dans sa vie d’avant, en partageant les moments d’insouciance qui ont précédé l’attaque. Puis vient l’enfer, les tueurs aux jambes noires qui abattent ses amis à la kalachnikov et qui l’abandonnent allongé dans le sang, la partie inférieure du visage réduite en bouillie. Blessé de guerre dans un pays en paix, il entre alors dans un monde parallèle à celui où la vie continue… celui d’une lente reconstruction.
Après un premier tiers de récit tout bonnement bouleversant, Philippe Lançon partage son chemin de croix de la Salpêtrière aux Invalides: 282 jours d’hôpital entouré de policiers armés, dix-sept opérations, un menton reconstruit à partir d’un morceau de son péroné, de nombreuses greffes de peau, beaucoup de bricolage et de rafistolage… sans oublier toutes les complications. Le parcours est certes long et particulièrement détaillé, mais il permet également de rendre hommage aux personnes qui l’ont accompagné durant ce calvaire, du corps médical aux policiers affectés à sa sécurité, en passant par tous ceux qui se sont succédé à son chevet.
Si l’écriture de Philippe Lançon est de toute beauté, ses nombreuses digressions ont parfois tendance à trop allonger le récit. Il affirme d’ailleurs lui-même que son gros défaut en tant que journaliste était la longueur de ses articles. L’accumulation de détails permet cependant de restituer la longueur des épreuves qu’il a affronté. Puis, comment pourrait-on reprocher à quelqu’un de mettre trop de mots sur quelque chose d’invivable, d’indicible… surtout que chaque mot, chaque note de musique, chaque petit bout de culture semble avoir contribué à le remettre sur pied et à le sauver des ténèbres…
Le roman se conclut dix mois plus tard lors d’un séjour à New York, censé constituer un tournant dans la reconstruction de Philippe Lançon, mais malheureusement marqué par l’écho des balles des djihadistes qui viennent d’ouvrir le feu au Bataclan. En terminant son roman par les attentats du 13 novembre 2015 à Paris, il démontre que le chemin sera encore long et que le fossé creusé entre l’ancien monde, celui où pas grand monde n’était Charlie, et celui où il est devenu une « gueule cassée » vivant constamment dans l’insécurité, est encore très grand…
Une mise à nu saisissante, récompensée par le prix Femina 2018 !
Le Lambeau, Philippe Lançon, Gallimard, 512 p., 21€
Lisez également : Antoine Leiris – Vous n’aurez pas ma haine, Luz – Catharsis, Catherine Meurisse – La légèreté
Ils en parlent également : La culture dans tous ses états, Ellettres, Mes belles lectures, Sonia boulimique des livres, Hanae part en livre, Plumes et Pages, Liseuse Hyperfertile, Des plumes et des pinceaux, Lectures de rêves, Topobiblioteca, Dadoulit
16 janvier 2019 à 15 h 24 min
Ce récit poignant mais non dénué d’humour sur le parcours de reconstruction de ce journaliste après les attentats de Charlie m’a également beaucoup marquée. Je te rejoins néanmoins sur les longueurs que j’ai trouvées un peu superflues aux 2/3 du livre.
16 janvier 2019 à 18 h 48 min
Le récit a l’air aussi beau que touchant. Je ne suis pas dans une période propice à lire ce genre de témoignage, mais je le note. Tu as su trouver les mots pour donner envie de le lire.
16 janvier 2019 à 21 h 16 min
Ah oui, en effet très important de choisir le bon moment pour lire ce type de livre… En te souhaitant une période plus propice et une bonne lecture 😉
16 janvier 2019 à 20 h 07 min
Il faut que je le lise absolument…
16 janvier 2019 à 21 h 19 min
C’est ce que je me suis dit pendant des semaines une fois qu’il avait gagné le prix Femina 😀
16 janvier 2019 à 22 h 43 min
Une vraie claque !
17 janvier 2019 à 10 h 23 min
Je vais me bloquer une semaine cette année pour le lire……. ABSOLUMENT ! 🙂
19 janvier 2019 à 13 h 31 min
merci beaucoup pour votre retour, ça donne vraiment envie de le lire 😉
19 janvier 2019 à 19 h 58 min
Ce livre est sublime ! Le récit de la reconstruction d’un visage et d’un homme qui a survécu au pire. J’étais bouleversé à la fin du récit. Merci pour ce beau partage 🙂
20 janvier 2019 à 14 h 42 min
De tous les récits sur les attentats, avec la BD de Luz, c’est celui qui m’a le plus touché…
29 mars 2020 à 17 h 36 min
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