Inio Asano – Le champ de l’arc-en-ciel


AsanoLe petit Suzuki vient de rejoindre un nouvel établissement scolaire et se retrouve dans une bien étrange situation. Une rumeur se répand en ville et alimente la peur des écoliers. Une mystérieuse bête se cacherait à l’intérieur d’un tunnel derrière l’école et la fin du monde serait proche. Afin d’apaiser la colère de l’animal, les élèves décident de sacrifier une fille de leur classe, présumée à l’origine de la malédiction. La chute d’Arié Kimura au fond du puits relié au tunnel de Nijigahara n’a donc rien d’accidentel et les remords de ses petits « copains » sont bien réels.

C’est un one-shot très sombre et complexe que livre l’auteur de « Solanin », « Un monde formidable », et « Le quartier de la lumière ». La couverture donne d’ailleurs immédiatement le ton et préfigure de la noirceur et du contenu malsain de cette histoire réservée à un public averti.

C’est en baladant le lecteur à travers le passé, le présent et le futur de nombreux protagonistes que le mangaka lève lentement le voile sur cette rumeur qui alimente la terreur locale et sur les événements qui sont à l’origine des profonds traumatismes qui rongent les habitants. La complexité du puzzle proposé par l’auteur est renforcée par des sauts temporels assez flous et par des scènes issues de rêves qui se mêlent à la réalité. Les protagonistes voyagent ainsi à travers les différentes périodes et se transforment parfois en papillons lorsque le rêve prend le dessus sur la réalité. Le caractère décousu du récit qui en découle peut certes déconcerter, mais Inio Asano parvient néanmoins à garder son histoire très captivante. Etonnamment, arrivé à la dernière page, l’incompréhension qui résulte inévitablement de cette première lecture ne laisse pas seulement un léger sentiment de frustration mais également une incroyable envie de relire le tout afin d’essayer de trouver les quelques clefs qui permettront de tout mieux comprendre.

L’aspect chaotique de l’histoire retranscrit cependant parfaitement la complexité psychologique des personnages et le cocktail d’émotions qui en émane. Car, au-delà d’une ambiance sombre, mystérieuse et prenante, Inio Asano livre des individus qui reflètent parfaitement le malaise profond de la jeunesse japonaise, ainsi que l’individualisme d’une société au bord de la rupture. Certaines scènes ont beau être issues de rêves, les sentiments qu’elles véhiculent sont, par contre, très réels. Usant d’un dessin clair et précis et de protagonistes qui décident de se réfugier dans la violence, la haine, la solitude et/ou l’imaginaire, le mangaka retranscrit à merveille toutes sortes d’émotions. Il tisse ainsi des relations complexes, basées sur la vengeance, l’amour, la jalousie et de nombreux traumatismes qui trouvent leur origine dans le champ de Nijigahara.

Le champ de l’arc-en-ciel est un récit dur, surprenant, compliqué, poétique, qui invite à la relecture …

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