Elodie Durand – La Parenthèse


Une parenthèse qui mérite d’être ouverte …

Elodie Durand La parenthèseÀ 21 ans, Judith est régulièrement victime de malaises, dont elle ne semble jamais se rappeler. Les médecins diagnostiquent assez vite une épilepsie, une sorte de court-circuit provoqué par une petite étincelle qui vous déconnecte momentanément de la vie. Malgré un traitement adapté, les symptômes s’aggravent, les absences se multiplient et les crises gagnent en intensité. Au bout d’un certain temps, de scanner en IRM, les médecins finissent par déceler une petite tumeur cérébrale.

Avec La parenthèse, Elodie Durand raconte une histoire, la sienne, et emmène le lecteur dans les méandres d’une maladie neurologique peu connue. Au fil des pages, elle tente de reconstruire cette parenthèse de quatre ans, dont elle n’a que peu de souvenirs, mais dont les séquelles demeurent perceptibles. Des premières manifestations aux interventions médicales périlleuses, en passant par les consultations chez le neurologue, le lecteur accompagne Judith (l’alter ego de l’auteure dans le livre) tout au long de ce voyage à la fin incertaine. Un combat de longue haleine qui a pour fil rouge une mémoire de plus en plus défaillante. Des symptômes de l’oubli d’abord anodins, qui résultent finalement dans la perte de capacités que l’on croit souvent acquises ad vitam aeternam, tel l’alphabet ou son propre nom. Le passé s’écrit alors à l’encre transparente et le réveil s’effectue perdu en face d’une feuille blanche, sans aucune trace des moments vécus. Alors que derrière, les repères se font de plus en plus rares, et que devant, le futur est de plus en plus indécis, le quotidien est rythmé par la régression et la fatigue. Obligée de bâtir un avenir hypothétique sur du vide, elle s’accroche à des proches qui font office de mémoire, de soutien et de balise au sein d’un monde qui s’efface lentement et s’obscurcit, en attendant le retour de la lumière. Car, dès les premières planches, l’issue ne fait aucun doute, Judith va bel et bien s’en sortir.

À travers ce one-shot autobiographique, Elodie Durand tente de renouer les fils de sa mémoire. En rassemblant ses maigres souvenirs et en interrogeant ses proches, elle part à la recherche de ces images du passé qui prouvent que l’on a existé, tel cet album photo que l’on espère retrouver dans les cendres d’une vie partie en fumée. Si cette reconstitution des faits et cette envie de partager ont certainement des vertus thérapeutiques pour l’auteure, le témoignage qui en résulte s’avère touchant dans toute sa simplicité. Malgré la difficulté des épreuves endurées et le caractère émouvant de cette lutte contre l’adversité, le scénario ne se veut jamais larmoyant. La narration à plusieurs voix accroche immédiatement et accentue l’empathie envers cette jeune fille dont ont partage le désarroi et les confidences.

Les dessins sobres et épurés d’Elodie Durand accompagnent son histoire avec énormément de justesse et de sensibilité. Le fait d’intégrer des croquis réalisés pendant sa convalescence aux planches du récit, ajoute encore plus de force et d’émotion à ce graphisme tout en noir et blanc.

Une parenthèse qui mérite assurément d’être ouverte …

2 Réponses to “Elodie Durand – La Parenthèse”

  1. […] Yvan m’avait conseillé de lire cet album, voici sa chronique. Je vous propose aussi de lire les avis d’Harenzo, des Modernes et de voir la preview sur Digibidi. […]

  2. […] ouvres aux thèmes similaires, nous vous invitons à lire Pourquoi j’ai tué Pierre (Olivier Ka), La Parenthèse (Elodie Durand) ou encore L’Ascension du Haut Mal (David […]

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